Table ronde des professionnels pour l’Habitat
Naples, 6ème Forum Urbain Mondial, Mercredi 5 septembre 2012
Intervention de Xavier CREPIN
Architecte Urbaniste, Trésorier d’AdP « Villes en Développement »
Je représente ici les membres de l’association de professionnel ville en développement, AdP, qui réunit depuis plus de trente ans des professionnels actifs dans les pays du sud issus des différents métiers de la connaissance, la conception, la production et la gestion des villes, ayant en commun le français comme langue de travail. Nous intégrons un tiers de jeunes pour renouveler les générations de professionnels.
Au nom des 200 membres de villes en développement, je souhaite tout d’abord remercier le Directeur Exécutif d’ONU Habitat, Joan Clos, et les Autorités de la ville de Naples et de sa région pour avoir organiser avec tant de réussite ce 6ème Forum Urbain mondial. Alioune Badiane nous a appelé à une position professionnelle éthique, ce qui correspond à la charte des professionnels adoptée il y a deux au 5ème Forum urbain de Rio, qui plaide pour une ville « durable et équitable ».
Je voudrais également remercier la présidente du Habitat Professional Forum, Louise Cox, pour le travail qu’elle a conduit depuis le Forum urbain de Rio de 2010, en publiant notre livre qui s’intitule en bon français « Better Professionals ! Better Cities ». J’espère qu’il pourra être publié dans d’autres langues dont le français.
D’abord quelques mots sur Naples et sa région qui nous accueillent si bien pour ce 6ème Forum urbain.
Naples est elle le lieu idéal pour parler du futur des villes, au pied du Vésuve qui a déjà engloutit Pompéi et Herculanum il y a quelques siècles, ce qui nous permet de comprendre la vie urbaine au temps des romains, et aussi la fragilité des villes qui ne sont pas éternelles et peuvent naitre grandir et disparaître rapidement ?
La réponse est trois fois « Oui », et Luigi Vinci, le président de l’association des professionnels de Naples en a donné les grandes raisons. Mais je voudrais revenir sur quelques unes d’entre elles.
Oui, car Naples a inventé la solidarité, et vous pouvez en trouver le témoignage au Mont de piété où le chef d’œuvre du peintre Caravage, les sept œuvres de miséricorde, témoigne le de la filiation napolitaine des objectifs du millénaire pour le développement qui sont au nombre de huit.
Les six premiers objectifs de lutte contre la pauvreté (nourrir, éduquer, protéger, soigner, accueillir) sont identiques depuis le début du XVIIème siècle ! Naples est une ville ouverte au monde qui n’a pas peur des autres et fait face à leurs problèmes.
Oui, parce que Naples est une ville qui affronte tous les désordres techniques, économiques, sociaux et environnementaux avec détermination, en mobilisant ses différents acteurs publics et privés, ce qui correspond au septième objectif des OMD, l’environnement (logement, assianissement).
Oui, enfin parce qu’au delà de ses propres problèmes, elle a, en organisant ce 6ème forum urbain mondial, contribué à renforcer autour du thème de la ville le partenariat mondial pour le développement, huitième objectif des OMD.
Nous sommes donc au cœur du débat qui nous réunit ce jour en Italie, préparer le futur des villes et réfléchir à la contribution des professionnels pour le sommet habitat III.
Pour cela il faut que les professionnels de la ville travaillent ensemble et travaille avec les autres acteurs.
A Rio de Janeiro, après avoir adopté la charte des professionnels, j’avais appelé à la collaboration entre les professionnels et l’ensemble des acteurs de la ville (élus, ONG, entreprises, universitaires et chercheurs). La France a lancé à Rio le partenariat français pour la ville et les territoires, le PFVT qui est désormais opérationnel et réunit tous les acteurs concernés impliqués dans la coopération internationale, et dont témoigne le pavillon français dans ce forum.
Je voudrais insister aujourd’hui sur la nécessité que les citoyens/citadins et les professionnels travaillent ensemble pour le futur des villes. Et j’apprécie particulièrement la présentation faite par Alison Brown de Wiego sur la ville inclusive.
Cela doit nous amener à élargir le fonctionnement de notre Forum des professionnels sur les nouveaux métiers de la ville pour l’emploi et la solidarité, sans oublier les groupes actifs que sont les jeunes et les femmes. C’est la seule voie pour répondre aux enjeux de la ville durable dans le monde de demain.
Au delà des chiffres de l’urbanisation qui sont désormais connus et reconnus par toutes et tous, la réalité urbaine de la majorité des citadins dans le monde, au nord comme au sud, c’est la difficulté quotidienne à vivre la ville qui domine, pour avoir de l’eau ou mettre ses enfants à l’école, pour pouvoir quotidiennement se rendre à son travail avec la contrainte énergétique qui renchérit les couts de déplacement, pour s’alimenter correctement.
Face à ces enjeux de durabilité et d’équité des villes, tous les professionnels doivent se mobiliser en faisant preuve d’imagination, afin de répondre à ces défis majeurs.
Imaginer la ville du futur pour toutes et tous, c’est notre impératif quotidien.
Pour changer la ville, comme la campagne urbaine mondiale lancée par ONU Habitat nous y invite, il faut que chaque citoyen invente sa manière de vivre la ville. C’est tout le sens du plan mondial pour les villes.
Après Istanbul en 1976 qui a vu émerger l’habitat et sa production comme un enjeu majeur pour l’Humanité et plus particulièrement dans les pays pauvres, et Habitat II qui en 96 a été le sommet des villes avec la reconnaissance d’une nécessaire collaboration entre l’Etat les Collectivités territoriales et la société civile, la prochaine conférence habitat III porte sur la ville comme un droit pour chaque citadin à mener une vie décente.
Pour cela, le manifeste pour la ville et le programme mondial pour la ville sont autant d’outils de mobilisation universelle auxquels les professionnels ont largement contribué, et pour la diffusion desquels ils vont œuvrer sans relâche dans les prochaines années.
Il faut désormais les rendre opérationnels et y associer tous les acteurs, qu’ils soient publics, privés ou non gouvernementaux.
Dans les villes en développement, la diffusion massive des téléphones portables et l’accès en temps réel à Internet ont permis aux citadins de disposer d’outils de communication performant et abordables. L’utilisation de ces outils a montré son efficacité lors des récents mouvements dans le monde que ce soit pour les printemps arabes ou pour d’autres mouvements dans le monde. Avec eux, nous devons diffuser le message de changement de la ville, chacun à son niveau.
Nous, professionnels d’AdP « villes en développement », nous nous déclarons donc acteur du changement et nous nous engageons à agir et à transformer nos villes pour un meilleur avenir urbain.